En 1979, le bateau Sea Valiant se posait en baie de Douarnenez pour des réparations, suite à des défauts techniques. Lors des manipulations, on perce accidentellement une des soutes à combustibles. Au total, ce sont 30 tonnes de fioul lourd qui se déversent sur la côte bretonne. La Bretagne a été marquée à plusieurs reprises par des accidents écologiques semblables, à l’instar de l’Amoco Cadiz ou de l’Erika. Plus de trente ans après l’incident du Sea Valiant, une entreprise de fret maritime soucieuse des enjeux écologiques se crée dans cette même baie de Douarnenez. Il s’agit de TOWT (pour Trans Oceanic Wind Transport).

Créée par Guillaume Le Grand et Diana Mesa, l’idée de l’entreprise est de faire du fret maritime avec un bilan carbone au plus bas. Pour cela l’entreprise utilise des bateaux à voile. Le transport maritime n’est pas forcément le secteur avec le plus haut bilan carbone, 3% uniquement, mais ce chiffre risque fortement d’augmenter à l’avenir. Ainsi, l’Organisation Maritime Internationale a pour projet de réduire de 50% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 dans le secteur du transport maritime. Les voiliers sont pour cela une excellente alternative, n’émettant quasiment pas de gaz à effet de serre. Le retour des vieux gréements dans le transport international n’est qu’à ses balbutiements et l’Institut Supérieur d’Economie Maritime estime que l’essor du secteur de la propulsion vélique ne sera atteint qu’en 2030-2040, le temps que les premières lignes soient bien ancrées dans le marché et que les investisseurs aient tout à fait confiance quant aux délais respectés et à l’efficacité générale.

TOWT affirme avoir transporté plus d’un million de produits en dix ans. Parmi ces produits on trouve surtout des « produits non périssables biologiques, naturels ou issus du commerce équitable », comme du thé, du chocolat ou encore du rhum. Ces produits sont garantis Anemos, un label créé par l’entreprise garantissant que le produit a été transporté avec un bilan carbone bas. Le label permet aussi la traçabilité du produit.

L’entreprise souhaite développer davantage son activité en investissant dans de nouveaux bateaux, plus performants et pouvant contenir plus de marchandises. Le premier bateau devrait être opérationnel fin 2022 et coûterait dix millions d’euros. Un financement participatif a été mis en place sur la plateforme Lita.com. L’objectif est d’obtenir trois millions d’euros d’ici septembre. Le reste sera financé par des emprunts bancaires. Le nouveau bateau pourra transporter 1 200 tonnes de marchandises. Il sera possible de voyager à bord du bateau pour un budget compris entre 2 000 et 4 000 € par personne. Sur le long terme TOWT souhaite posséder quatre voiliers similaires.

En faisant le pari des voiliers, TOWT, mais aussi Grain de Sail, s’inscrivent dans une tradition de transport maritime innovant qui a su faire les grands moments de la Bretagne. Étant encore un secteur spécialisé, voire marginal, le fret à propulsion vélique est à observer avec attention. Il n’est pas impossible que ce soit un tournant à jouer pour l’économie bretonne. Sa géographie stratégique pour le transport maritime est observée depuis longtemps. Voilà ce que disait Yves Gourmil, un ligueur breton du XVIe siècle : « Il n’y a membre, en tout l’Occident, de si grande importance pour le regard des affaires générales du monde que […] la possession de la Bretagne, pour autant qu’elle est située, comme un centre au milieu de sa circonférence, tant par mer que par terre, entre tous les États de l’Occident, à savoir, Espagne, France, Angleterre, Irlande, et tous les Pays-Bas. » Le transport maritime écologique pourrait ainsi être une carte à jouer pour la Bretagne.